PÉKIN, Chine — Le programme spatial chinois, en plein essor, a réalisé jeudi une première pour l'espèce humaine: un atterrissage sur la face cachée de la Lune, exploit qui rapproche la Chine de son objectif de devenir une puissance spatiale.
Trois pays — les États-Unis, l'ex-Union soviétique et plus récemment la Chine — ont lancé des engins spatiaux au plus près de la Lune, la partie qui fait toujours face à la Terre, mais l'alunissage de jeudi constitue une première de l'autre côté du satellite naturel, sur sa face cachée.
L'Administration spatiale nationale de Chine a déclaré que l'atterrissage de l'engin Chang'e 4, à 10 h 26, a «ouvert un nouveau chapitre de l'exploration humaine de la Lune». Une photo prise à 11 h 40 et transmise par Chang'e 4 montre un petit cratère et une surface stérile qui semble être éclairée par un phare de l'explorateur lunaire. Le nom de l'engin spatial vient de celui d'une déesse chinoise qui, selon la légende, vit sur la Lune depuis des millénaires.
Cet alunissage souligne les ambitions grandissantes de la Chine de rivaliser dans l'espace avec les États-Unis, la Russie et l'Europe — et plus largement de renforcer la position du pays en tant que puissance régionale et mondiale. «Le rêve de l'espace fait partie du rêve de rendre la Chine plus forte», déclarait en 2013 le président Xi Jinping, peu après être devenu le leader de la Chine.
En fin d'année, les médias et les responsables chinois ont salué le lancement de Chang'e 4, le 8 décembre, comme l'une des réalisations majeures de la nation en 2018.
«Globalement, la technologie spatiale chinoise reste à la traîne par rapport à l'Occident, mais avec l'atterrissage de l'autre côté de la Lune, nous avons fait un immense saut en avant», a déclaré Hou Xiyun, professeur à l'école d'astronomie et de sciences spatiales de l'Université de Nanjing. Il a ajouté que la Chine avait dans sa mire Mars, Jupiter et les astéroïdes: «Il ne fait aucun doute que notre pays ira de plus en plus loin.»
Rapporter des échantillons
En 2013, Chang'e 3, le prédécesseur de la mission actuelle, avait effectué le premier atterrissage sur la Lune depuis le Luna 24 de l'ex-Union soviétique en 1976. Les Américains sont les seuls à avoir envoyé avec succès un humain sur la Lune, bien que la Chine envisage elle aussi une mission habitée. Pour l’instant, elle souhaite envoyer une sonde Chang'e 5 sur la Lune l’an prochain et la faire revenir sur Terre avec des échantillons — ce qui n’a pas été fait depuis la mission soviétique de 1976.
La face cachée de la Lune est relativement peu connue. Sa composition est différente de celle de la face visible, où les missions précédentes avaient atterri. Chang'e 4, constitué d'un module d'alunissage et d'un minirobot mobile, effectuera des observations astronomiques et examinera la structure et la composition minérale du sol, au-dessus et en dessous de la surface lunaire.
L'un des défis à relever pour travailler de l'autre côté de la Lune est la communication avec la Terre. Pour pallier ce problème, la Chine a lancé un satellite relais en mai afin que Chang'e 4 puisse renvoyer ses informations.
La Chine a mené sa première mission spatiale habitée en 2003, rejoignant ainsi la Russie et les États-Unis. Elle a mis en orbite deux stations spatiales et envisage de lancer un module d'exploration vers Mars au milieu des années 2020. Son programme spatial a connu un rare échec l’an dernier avec le lancement raté de sa fusée Longue Marche 5.