Le parolier Webster était tellement fier lorsque Robert Lepage l’a approché lors de la création du spectacle Slav. Il a par contre vite déchanté!
Diplômé en histoire, le parolier Aly Ndiaye, aussi connu sous le nom de Webster, était enchanté lorsque Robert Lepage l’a consulté au début du projet du spectacle Slav, mettant en scènes des chants d’esclaves noirs.
Lorsqu’il s’est aperçu que seulement la minorité des choristes du spectacle serait noire, il a été surpris et a suggéré aux créateurs d’embaucher des artistes noirs pour personnifier les esclaves noirs des champs de coton.
«Sur les six ou sept choristes, il y avait deux choristes noires et les autres étaient blanches et jouaient le rôle d’esclaves. Et le problème pour bien des gens, dont moi, c’était ça. C’est-à-dire de faire jouer des rôles de personnes noires esclaves par des blancs. L’esclavage a laissé des âmes meurtries encore à notre époque. Ce sont des cicatrices pour bien des gens. Et surtout à une époque où les membres des diverses communautés répètent sans cesse qu’il manque de diversité dans nos médias. Pour une fois qu’il y avait une pièce à propos de l’histoire noire, mais qu’elle est jouée par des blancs, les gens se sont sentis insultés», a-t-il expliqué en entrevue avec Louis Lacroix.
Bien qu’il sait très bien que le metteur en scène Robert Lepage, l’interprète Betty Bonifassi et le Festival international de jazz de Montréal n’ont pas eu l’intention d’insulter qui que ce soit, il considère que ces gens ont manqué de sensibilité.
«Si on avait voulu rendre hommage (aux esclaves noirs), on aurait respecté le contexte dans lequel ces chants ont été faits et on aurait impliqué des gens de la communauté noire dans ce processus. Il doit y avoir une sensibilité de la part des créateurs et interprètes face à des histoires comme celle-ci. Quand on parle d’esclavage, il y a tout un bagage qui vient avec. Il doit y avoir un décorum, on ne peut pas seulement en faire un événement mondain. Ç’aurait été une belle opportunité de mettre de l’avant les talents noirs du Québec.»
Webster est donc satisfait de la décision du Festival internation de jazz de Montréal d’annuler les représentations de Slav.
La mairesse réagit
Rencontrée dans le cadre d'un point de presse sur un investissement pour le transport collectif, la mairesse de Montréal, Valérie Plante, a dit comprendre les deux points de vue.
«Je comprends les gens qui revendiquent plus d'espace et une meilleure représentation au niveau de la culture et toutes les sphères, dans les médias également. Et je comprends également la démarche artistique qui semble avoir été bien documentée par les créateurs qui ont fait un travail en profondeur. Ceci étant dit, je respecte la décision du Festival de jazz qui l'a prise dans l'intérêt du Festival et de toute la population.»
Pour sa part, Robert Lepage devrait émettre ses commentaires, quant à l'annulation du spectacle, plus tard cette semaine.